Le club qui lit les autrices africaines

Incipit : 3 minutes, 33 secondes par Esi Edugyan

Il existe plusieurs manières de découvrir les livres, ce que nous faisons depuis début avril, sur le blog du Jifa Bookclub, c’est de voyager au cœur des incipit des 57 ouvrages de la sélection 2020-2021.

A titre d’information pour qui en a besoin : un incipit est le terme qui désigne les premiers mots (ou paragraphes) d’une œuvre littéraire.

Ouvrage du jour : 3 minutes 33 secondes

Genre : Roman
Année de publication : 2013
Nombre de pages : 368
Éditeur : Liana Levi
Collection : Piccolo
Traduction : Michelle Herpe-Voslinsky
Précédente édition : Serpent’s Tail 2011

Chip nous a déconseillé de sortir. Allez pas tenter le diable, les mecs disait. Mais la nuit avait été mouvementée, je vous jure, on tenait plus sur nos jambes, à cause du tord-boyaux-le tord-boyaux, la nôle des paysans de France, c’était pas cher, voyez-vous, mais çà faisait comme des clous dans les tripes. Même à regarder, c’est trouble et noir dans la bouteille, on croirait boire une eau marécageuse.

On était donc couchés dans l’appartement, éreintés, des tentures cloués sur les fenêtres. Le soleil du matin brillait si fort au travers qu’il vous tombait comme un drap sur la peau. Deux ou trois heures plus tôt, on avait joué dans un studio minable dans l’idée d ‘enregistrer un disque. Une petite pièce sinistre, plutôt un placard à fantômes qu’un endroit où faire de la musique, les radiateurs fendus qui crachotaient leur vapeur, le plancher gondolé jonché de bouteilles vides. Nos cigarettes faisaient des petits trous de lumière dans le noir, c’est comme ça que je sais que ça marchait pas. La fumée de Hiero bougeait pas. La clope lui pendait aux lèvres comme si ça s’embrouillait dans sa tête. On arpentait tous La pièce, et entre les prises on écoutait le raffut que les rats faisaient dans les murs. On tenait pas en place. Peut-étre qu’on était pas si mauvais, mais moi en tout cas je me sentais pas dans mon assiette. Trop nerveux, trop inquiet, trop occupé à surveiller la porte ; rien à voir avec l’isolement du studio. Rien ne pouvait m’arracher à moi-même. Prise après prise, je m’acharnais à jouer jusqu’au bout et…

Avez-vous lu le roman d’Esi Edugyan ? Envisageriez-vous une (re)lecture commune ?

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