Nous poursuivons les voyages au cœur des incipit de la sélection 2020-2021 du Jifa Bookclub.
A toutes fins utiles : un incipit est le terme qui désigne les premiers mots (ou paragraphes) d’une œuvre littéraire.
Ouvrage du jour : Boy, Snow, Bird
Genre : Roman
Année de publication : 2016
Nombre de pages : 308
Éditeur : Galaade Editions
Collection : Littérature étrangère
Traduction : Guillaume Villeneuve
Précédente édition : Riverhead Books (2014)
Personne ne m’a jamais prévenue au sujet des miroirs, de sorte que je les ai appréciés durant longtemps, les croyants fiables. Je me cachais entre eux en en plaçant deux face à face de sorte que , debout au milieu , j’étais réfléchie à l’infini dans l’un et l’autre sens. Beaucoup, beaucoup de moi. Quand je me dressais sur la pointe des pieds nous étions toutes dressées sur la pointe des pieds, à tâcher de voir la première d’entre nous, et la dernière. L’effet était vertigineux, une immense pulsation, pas tout à fait vivante, tenant plus du fonctionnement de l’automate. Je ressentais le reflet sur mon épaule comme un tapotement. J’étais avec lui dans les termes les plus intimes, comme n’importe quelle petite nouille trop seule pour être difficile avec ses fréquentations.
Les miroirs me montraient que j’étais une fille à natte blonde décolorée ramenée sur l’épaule ; aux sourcils et cils de la même couleur ; aux yeux Larmes, presque noirs ; ayant l’un de ces visages que certains qualifient de «dur», d’autres de «ciselé». Il n’était pas rare que je m’enroule un foulard autour de la tête et passe l’après-midi à jouer une nonne venue d’un siècle passé ; j’avais le front assez haut. Et ma complexion est imprévisible, passe du quasi-blafard à l’ébouillanté pour revenir au point de départ, tout cela malgré moi. Il m’arrive encore de devoir me regarder le visage pour savoir si je suis troublée ou pas.
Avez-vous ce roman de Helen Oyeyemi ? On organise des lectures communes, çà vous dit de nous rejoindre ?
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