Le club qui lit les autrices africaines

Page 31 : Afropean Soul et autres nouvelles de Léonora Miano

Voyager au cœur de toutes les pages 31 des ouvrages de la sélection du Jifa BookClub, c’est l’occasion de découvrir un livre de manière amusante tout en faisant un clin d’œil au 31 juillet qui est la date de célébration de la Journée Internationale de la Femme Africaine.

Après vous avoir présenté son incipit, voyons ce qu’il en est de la page 31 du recueil de Léonora Miano : Afropean Soul et autres nouvelles.

Afropean Soul et autres nouvelles – Page 31

… m’en aller. Que dire aux autres ? Ils m’avaient vu partir pour devenir un lion indomptable.

Je suis sorti pour acheter une baguette. Sa femme m’avait donné de la menue monnaie, avant de me prier de descendre à la boulangerie. Je ne suis pas revenu. D’abord, je voulais seulement réfléchir. Prendre un peu l’air. La nuit m’a trouvé dans la rue, hébété devant ce casse-tête dont je cherche encore la solution. Comment faire pour laver ma honte et rentrer la tête haute ? Au moins glaner quelques euros, çà et là. Economiser pour monter un petit commerce. Cependant, sans papiers, on ne gagne pas grand-chose. On n’économise rien. Des jours et des semaines s’écoulent, au cours desquels on ne voit que de petites pièces. On peut juste s’offrir des biscuits chez Ed. Même pas une baguette. Le pain est trop cher. Le pain est un luxe. Dans la rue, j’ai fais des rencontres. Personne qui se soucie de mon histoire. Rien que des tuyaux pour me loger la nuit avant de décamper au petit jour. Rien que des compagnons de fuite, maître dans l’art d’échapper à la police. Cette science requiert tout le temps, toute l’énergie dont on dispose. On ne pense plus qu’a ça. Courir. Se cacher partout : Paris, banlieue, province, Paris. Le tour de France de l’effacement.

On compte une année, puis deux. On ne peut toujours pas retourner chez soi. Parce qu’on se doit à tout un clan qui végète dans un pays où les malades doivent arriver à l’hôpital avec leur seringue et leurs médicaments. Parce qu’on a laissé une mère veuve de l’époux dont elle était ta quatrième possession féminine légale. Parce qu’on est son fils unique, son dernier espoir de n’avoir pas subi pour rien tout ce qu’elle a enduré. La relégation au fond de la concession. Le mépris des coépouses dont elle avait ravi les privilèges nocturnes, étant le dernier caprice du mari. Que…

  1. Les joueurs de l’équipe nationale de football du Cameroun sont surnommés indomptables.
  2. Hébété : abasourdi ; dans un état d’abrutissement total.

Avez-vous lu le recueil Afropean Soul et autres nouvelles ? Envie d’en faire une prochaine (re)lecture commune ?

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